Et les grands-parents?
A l'occasion de la fête des enfants, j'avais écrit un petit billet sur certaines difficultés touchant l'enfance en général.
Depuis, notre journal a publié successivement trois articles autour du thème suivant:
Les grands-parents actuels et l'éducation des petits-enfants
A part Tokyo qui brasse des populations venues de toutes les régions du Japon et qui est donc une ville dans laquelle de jeunes parents n'auront pas forcément leurs parents à proximité, beaucoup de japonais ne s'éloignent pas beaucoup de leurs villes ou régions d'origine et tendent même, quand l'enfant paraît, à beaucoup compter sur leurs parents, surtout si les 2 conjoints travaillent, ce qui devient de plus en plus la norme et une nécessité.
Mais, autant cela ne suscitait aucune interrogation ou remise en doute il y a une vingtaine d'années, autant, de nos jours, les grands-parents sont devenus non seulement moins disponibles, mais aussi moins sûrs de leur compétence dans le domaine des soins à apporter à leur descendance.
Plusieurs raisons à ces nouvelles tendances:
- les jeunes couples n'habitent plus forcément avec leurs parents dans une espèce de contrat donnant-donnant; en cohabitant avec leurs enfants, les grands-parents, surtout s'ils sont à la retraite et valides, participent à la garde et aux soins à donner aux petits-enfants; on pourra en retour s'occuper d'eux quand ils seront devenus dépendants avec l'âge.
-Parmi les générations qui accèdent au statut de grands-parents actuellement, il y a une proportion non négligeable de femmes qui ont travaillé ou sont encore en activité, de même que leur conjoint. Quand ils arrivent à une retraite bien méritée, ils veulent profiter à leur guise de leur temps libre.
-Les principes de puériculture et d'éducation des enfants ont connu des transformations très importantes ces 20 ou 30 dernières années.
Ce dernier point est d'ailleurs traité dans le troisième volet de la série d'articles dont je veux vous parler:
Cette photo a été prise lors d'un séminaire organisé à Tokyo et intitulé:
éduquer avec plaisir enfants et petits-enfants.
Dans cet intitulé il y a une expression un peu difficile à traduire: 'tanoshi-i' dans 'tanoshi-i ko sodate, mago sodate'. On doit essayer de trouver une forme de plaisir à l'exercice, l'éducation, les soins apportés aux enfants et petits-enfants. Ce qui fait penser qu'il y a un degré possible de stress ou en tout cas d'inquiétudes qui a été diagnostiqué; et aussi que, peut-être, on comprend que la source de ce stress peut se trouver dans le caractère 'conjoint' de l'exercice car au fil des questions qui sont posées aux participants on se rend compte que parents et grands-parents ont des principes bien différents, et, que les grands-parent paraissent beaucoup moins rigoristes sur certains points.
Mais la bonne volonté est là. On va essayer de collaborer d'autant plus que cette décision est largement fondée sur le désir, de la part des grands-parents, de laisser leurs propres filles accèder aux deux 'plaisirs'; celui de la vie professionnelle et celui de la maternité. Après avoir poussé leurs filles à faire des études et à exercer une profession, ils ne se sentent pas le droit maintenant de leur imposer d'y renoncer.
Voilà une petite liste de sujets sur lesquels parents et grands-parents différent: je précise que cette liste a été compilée par une sage-femme, Mme Akiko BÔDA qui est responsable de l'association organisatrice des séminaires pour grands-parents et dont vous pouvez consulter le site ICI.
- l'hygiène corporelle du nouveau-né:
les parents estiment qu'il suffit de nettoyer la peau du bébé alors que pour les grands-parents, le rituel du bain est indispensable dès les premiers jours de la vie de l'enfant.
-Le passage à la nourriture solide:
pour les parents, il aura lieu vers l'âge de 6 mois alors que les grands-parents estiment cela possible au bout du deuxième mois.
-Donner du jus de fruits:
les parents sont contre car c'est mauvais pour les dents et peut provoquer des allergies alors que les grands-parents trouveraient que ça peut être une source de nutrition quand il y a une carence en lait.
-Durée pendant laquelle les enfants vont boire du lait au biberon ou du lait maternel:
Pour les parents, pendant 2 ou 3 ans, pour les grands-parents, un an seulement
-En cas de pleurs:
Les parents prennent l'enfant dans les bras pour le calmer. Les grands-parents sont réticents à donner ce qu'ils pensent est une mauvaise habitude au bébé
TRÈS INTÉRESSANT je trouve!
Ce genre de séminaires est organisé également dans notre région et ce sont donc des parents et des grands-parents curieux et soucieux d'améliorer leur expérience avec leurs enfants et petits-enfants qui participent.
Selon une enquête réalisée par une société d'assurances vie (Dai-ichi-sei-mei), 70% des grands-parents diraient avoir eu l'occasion de s'occuper de leurs petits-enfants.
Quelquefois cela devient un véritable travail, une fois la retraite prise, tel ce couple qui habite à une dizaine de minutes de chez leur fille et qui se rendent chez elle tous les matins pour y passer la journée, jouer avec leur petit-fils, le faire manger et qui rentrent chez eux une fois le bain du soir donné.
On avait inventé un terme pour décrire les pères qui s'occupent de leurs enfants; 'iku-men' dans lequel 'iku' veut dire 'éduquer'. On a maintenant; 'iku-jii' et 'iku-baa' pour le papi et la mamie qui prennent se rôle.
Une banque dans la préfecture de Fukushima、Tôhô-Ginkô, propose depuis le mois d'avril de cette année à ses employés de prendre un congé pour 'l'éducation des petits-enfants' ! Ils ont droit à 120 jours de congés pour lesquels ils peuvent utiliser aussi leurs jours de congés payés. Une pratique que le ministère du travail est en train d'étudier pour la promouvoir si cela était possible.
Ce qui est significatif dans ces évolutions est que grands-parents et parents habitent de moins en moins sous le même toit: en 1986, il y avait 46,7% de cohabitation de deux ou trois générations; en 2012 ce chiffre était tombé à 16%. Pourtant les grands-parents sont prêts à s'investir de manière significative tout en gardant quand même des plages horaires pour leurs propres vies. Quitte à faire de longs trajets et au fur et à mesure des changements dans la vie des uns et des autres à se rapprocher les uns des autres mais sans vivre ensemble.
Pour complèter le tableau sans angélisme, il faut quand même mentionner que toutes les coopérations, même si elles sont comprises et réalisées, ne sont pas toujours bien vécues.
Cela se traduit en général par la manifestation de troubles de santé; fatigue, vertiges, frustrations diverses. Comme par exemple de ne pas se sentir suffisamment valorisé et remercié ou de ressentir un sentiment oppressant de responsabilité non seulement par rapport aux petits enfants mais aussi envers leurs propres enfants, qui se déchargent sur eux et n'hésitent pas à les critiquer.
Au Japon on inculque le principe de 'patience', 'endurance' en silence, le 'gaman' et ce principe est profondément ancré dans les mentalités des seniors qui ont beaucoup de difficultés à exprimer leurs doutes et leurs désaccords. Quelquefois jusqu'à atteindre un tel niveau d'épuisement physique et psychologique que la seule issue est la rupture des relations avec leurs enfants et petits-enfants.
De plus en plus de médecins enregistrent de tels désordres chez leurs patients d'un certain âge.Une des nouvelles missions des séminiares dont nous avons parlé plus haut sera certainement d'alerter les participants de possibles dangers et de proposer des solutions préventives.
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